Le Comité d’initiative de la Ligue Nationale Aérienne, lors de sa séance du 10 novembre 1910, avait nomme plusieurs délégués, dont un certain Lucien Berte, résidant à Cesson près de Melun en Seine-et-Marne. C'est dans ce cadre qu'il contribue ensuite à la Revue Aérienne, organe officiel de cette Ligue. Il y relate ce qui se passe alors non loin de chez lui à Quincy-sous-Sénart, précisément au n°55 du 25 janvier 1911, pages 43-44.

Il existe un appareil peu connu du public, qui cependant possédera, une fois la mise au point faite, d'excellentes qualités aviatrices; c’est celui que M. Moreau expérimente à Quincy, petite ville de Seine-et-Oise. Cet appareil a été surtout construit d'après l'expérience et l'observation; c’est après des séjours prolongés dans le Jura, où il pouvait étudier les grands planeurs, que M. Moreau entreprit la construction de son monoplan.

Observateur et expérimentateur tenace autant qu'habile, il fit expériences sur expériences sur expériences, planeurs sur planeurs, sans jamais se laisser aller au découragement. Il y a quatre ans qu'il étudie, transforme son système et, aujourd'hui seulement, il arrive au but; en effet, un appareil construit sur les plans d'un planeur qui a parcouru 1.500 mètres pour 50 mètres de chute ne peut laisser espérer que le succès.

M. Moreau a surtout cherché à résoudre le problème de la stabilité transversale et longitudinale; la première, par la forme spéciale de l'aile et sa souplesse aux extrémités; la deuxième, en transformant le poids du pilote en poids utile, c'est-à-dire que le stabilisateur n'est plus manœuvré par le bras du pilote, mais par le propre poids de ce dernier.

À cet effet, l'aviateur est la masse d'un pendule qui commande par levier le stabilisateur de manière telle que l'appareil, oscillant autour du pilote, le gouvernail de montée ou de descente occupe toujours une position tendant à corriger le défaut d'équilibre.

Un dispositif spécial immobilise le pilote au départ et à l'atterrissage.

Étude sur le vol plané et la stabilisation automatique dans le Jura. L'appareil s'élève sous le vent ascendant. Surface portante, 2 mètres carrés; poids, 30 kilogrammes; parcours, 1.500 mètres; chute, 50 mètres.

Les caractéristiques de l'appareil sont les suivantes: monoplan de 12 mètres d'envergure, longueur totale 9 m. 50, moteur 35/40 chevaux, faisant tourner une hélice de 2 m. 40 de diamètre et 1 m. 30 de pas à 900 tours. Poids en ordre de marche, 500 kilogrammes.

Ce monoplan, trop lourd pour la faible puissance du moteur, n'a pas donné les résultats que son auteur attendait de lui. Un nouvel appareil ne pesant que 125 kilogrammes en ordre de marche, terminé à l'heure actuelle, doit être expérimenté à la fin de janvier. Je tiendrai d'ailleurs les lecteurs de la Revue Aérienne au courant des essais.

L. BERTE.

Lucien Berte, “Aéroplane Moreau”, Revue Aérienne 55 (25 janvier 1911) 43-44.